Banque - Finance - Assurance

Banques : comment les DSI aident l’innovation business à aller plus vite ?

Share this post:

Une conjonction de méthodes, technologies et modes de travail nouveaux crée un véritable élan pour l’innovation bancaire.

Vincent Daerden, responsable des activités de conseil et de services pour le secteur banque et finance pour IBM France, analyse le contexte actuel qui préside à la transformation des banques françaises. Il estime que nous ne sommes qu’au tout début d’une vague de changements économiques, technologiques et organisationnels sans précédent pour ces acteurs.

La vague de transformation que vit aujourd’hui le secteur bancaire est-elle exceptionnelle ?

Je suis, avec beaucoup d’attention, le secteur de la banque et des services financiers depuis plus d’une vingtaine d’années. Il est vrai que ce secteur a vécu divers changements technologiques qui ont insufflé de vraies remises en question et accéléré la transformation de l’activité bancaire. Mais aujourd’hui, je pense que nous assistons à un véritable momentum, porteur de changements profonds résultant d’une dynamique qui s’est construite depuis des années. Cela vient du fait que le sujet n’est pas seulement technologique. En effet, les organisations capitalisent aujourd’hui sur une proximité bien plus forte de leurs équipes IT et métier : cette nouvelle proximité change la portée des innovations mises en œuvre.

 

En quoi ce lien IT – métier est-il aussi important dans le cadre actuel ?

Les banques ont un nouveau rapport avec la technologie et l’IT : elles ne les considèrent plus comme de simples moyens d’exécuter leurs processus informatiques. Les méthodes agiles qu’elles mettent en place aujourd’hui leur permettent de coconcevoir en mode collaboratif IT – métier très en amont sur tous les projets et de s’appuyer sur de nouvelles plateformes technologiques qui changent la philosophie de leur système d’information. Je parlais de « momentum » car je pense que l’on se situe à un moment particulier de conjonction de méthodes nouvelles, de modes de travail nouveaux et de technologies qui rendent de tels dispositifs possibles et légitimes. L’impact sur l’innovation est direct et tangible : des cycles beaucoup plus courts, des déploiements moins importants, plus nombreux, plus rapides et avec des résultats immédiatement visibles. Le résultat de cette collaboration orientée métier est que les projets s’alignent beaucoup mieux sur les cas d’usage des clients ; le décalage quasi systématique entre la vision initiale client et la réalité mise en œuvre technologiquement est alors éliminé.

 

Il reste toutefois que les systèmes d’information existants ne peuvent pas être complètement réinventés en un claquement de doigts. Quelles questions pose ce poids du legacy face à un impératif de transformation qui semble obligatoirement passer par le cloud aujourd’hui ?

Il est certain que la complexité des systèmes IT existants, le legacy, pèse sur les capacités d’innovation d’une manière ou d’une autre. Quand on prend un peu de recul, on se dit d’ailleurs qu’il est invraisemblable de voir autant d’éditeurs de logiciels historiques, de grands acteurs du SaaS ou de nouveaux entrants dynamiques, coexister presque chaotiquement dans ces SI bancaires. Mais vous avez raison de le souligner, il y a convergence : tous ces acteurs sont, soit nés dans le cloud, soit en train de migrer leur offre dans le cloud ou de transformer leur offre pour opérer dans le cloud. Le mouvement est généralisé et vise notamment une exploitation massive de la data. En la matière, nous ne sommes qu’au tout début de cette vague de transformation. Sur la prochaine décennie, des investissements très importants vont avoir lieu pour transformer les systèmes d’information pour lesquels le poids des legacy constitue aujourd’hui encore un frein. Le problème principal des banques en la matière est de trouver des solutions qui soient satisfaisantes de bout en bout. De ce fait, les banques sont souvent contraintes à transformer d’abord leur front-office et à faire évoluer leur back-office dans un second temps.

On ne cachera pas que l’autre question est celle d’une certaine défiance vis-à-vis des Gafa autour du cloud ?

Contrairement à d’autres secteurs, les acteurs bancaires sont, je pense, extrêmement attentifs aux risques systémiques qu’implique le fait d’aller sur des plateformes portées par des acteurs d’un nouveau genre, aux capitalisations bien supérieures aux leurs ! Chez IBM, avec notre offre « IBM cloud for financial services », nous répondons à cette problématique et aux attentes de certaines grandes banques qui souhaitaient plutôt s’appuyer sur un acteur qui ne viendra jamais les concurrencer sur leur propre métier, tout en satisfaisant aux exigences technologiques de sécurité et de conformité réglementaire.

 

Dans ce contexte, quelle posture doivent adopter les DSI qui veulent accélérer l’innovation de leur entreprise dans le secteur bancaire ?

Une certaine maturité est en train d’émerger dans les organisations sur ces questions. Les dirigeants voient enfin l’informatique comme un vrai levier de transformation des banques. D’ailleurs, il est intéressant de constater que de plus en plus de DSI rejoignent le comex des banques et des institutions financières : c’est un signe qui ne trompe pas. Les raisons pour accélérer le changement sont nombreuses. Il y a des sujets clés comme l’open banking évidemment, mais je pense que cela ne sera pas une révolution qui va tout emporter sur son passage. En revanche, il y a actuellement une refonte majeure des cas clients sur la mobilité, les paiements… Et cela se fait en parallèle d’une prise en compte de contraintes budgétaires très fortes dans une économie de crise. En moyenne, on ne reviendra sur les budgets informatiques de 2018 qu’en 2022 au plus tôt. Dans ce contexte, le DSI doit impérativement se concentrer sur la valeur apportée à ses clients internes et externes. Par exemple, mettre de la valeur ajoutée dans la relation client, en intégrant de l’IA dans les processus métier afin « d’augmenter » le conseiller clientèle et répondre à la problématique de réduction du nombre d’agences.

 

Et sur les profils des DSI eux-mêmes ?

Je vois l’émergence d’une certaine tentation à nommer des DSI qui auraient un background plus métier qu’IT, motivée par l’idée de positionner à la tête de l’informatique des profils rompus à de nouveaux modes de collaboration, voire à déléguer des équipes et à répartir l’IT de manière différente dans l’organisation. Cela s’est fait avec plus ou moins de réussite. « Run the bank », c’est-à-dire concrètement gérer une banque et la production informatique associée, cela ne s’improvise pas et requiert des compétences qui ne sont pas celles d’origine d’un acteur métier… Sans compter la fragilité induite par la complexité des strates IT et la perte ou l’éloignement de compétences et l’exigence accrue en matière de sécurité et d’ouverture.

 

Quelle autre solution alors ?

Cette tendance va se poursuivre mais nécessite que l’on ne pense plus la DSI comme une simple direction informatique, que l’on fasse évoluer son organisation, que la place laissée à l’innovation ne soit pas juste un « bac à sable » mais une démarche réfléchie qui fasse partie intégrante de la stratégie et soit partagée par l’ensemble de l’organisation. Passer à l’échelle sur des sujets comme l’IA, en créant une factory mêlant métier et IT, pour aller de la conception jusqu’au déploiement sur le réseau, comme l’a fait par exemple le Crédit Mutuel, nécessite une tout autre organisation. La remise en question de la DSI se joue là, sur la structure de coût mais aussi sur la culture financière des dirigeants qui permet de favoriser efficacement ce type de projet. Sur ces questions complexes, le sujet du cloud est en fait souvent le déclencheur initial pour faciliter l’harmonisation et la révision du modèle opérationnel existant.

Que nous réservent les mois à venir ?

Le sujet qui va peser sur ces transformations dans le futur est le mouvement de verticalisation que l’on voit apparaître, à savoir l’émergence de plateformes s’adressant au secteur banque – finance. Les plateformes mises en œuvre proposent une offre et des fonctionnalités de plus en plus larges mais vont devoir traiter les sujets en profondeur pour être pertinentes : c’est très visible typiquement sur l’analyse de la data. Chez IBM, notre plateforme IBM cloud for financial services dédiée au secteur banque – finance nous permet de prendre en compte les problématiques intrinsèques du secteur bancaire en matière de sécurité et de conformité. Ouverte, elle fédère également un écosystème composé d’un ensemble d’acteurs certifiés proposant un large éventail d’offres et de services innovants.

Le monde de la banque dans les cinq ans à venir va donc profondément changer sa manière d’opérer les projets numériques. Certaines, comme BNP Paribas, ont même la volonté de mettre à disposition leur plateforme auprès d’autres acteurs tiers, pour réduire les coûts, mutualiser le savoir-faire, les compétences et les assets. Ce sont des pionnières !

La suite, sera aussi la nécessité absolue pour ces acteurs de garder la maîtrise, au-delà du risque marché global, sur la partie technologique : ne pas se laisser déposséder de ses compétences et de son destin, ne pas tout externaliser sous prétexte qu’on le peut facilement, avec toutes les promesses de sécurité du monde. Comme avec les centres de compétences offshore, toute externalisation a un impact sur l’agilité et l’accélération des cycles d’innovation. Il faut donc trouver le bon équilibre. On verra des arbitrages nombreux en la matière : des fonctions non stratégiques seront déléguées à des plateformes externes mais des projets qui seront des différenciateurs majeurs pour la banque devront être gérés avec suffisamment de compétences en interne. Et je pense que ces arbitrages se feront notamment sous l’angle de la confiance : le fait d’avoir une multitude d’acteurs innovants à disposition nécessite une vision de confiance globale et oblige à resserrer les liens avec son écosystème. C’est un défi structurel que les acteurs du numérique comme IBM doivent relever.

Cette interview est extraite du carnet d’expériences réalisé avec alliancy « Banques : comment les DSI aident l’innovation business à aller plus vite ? ». Téléchargez le carnet entier.

Pour en savoir +, visionnez le replay de la session « Le Cloud au service de la transformation digitale du secteur bancaire : témoignage du groupe BNP PARIBAS » à Think Summit France !

 

Managing Partner - BNPP, IBM France

More Banque - Finance - Assurance stories
3 juillet 2024

Intégration par design : la clé de la réussite de la transformation cloud

La transformation cloud est un processus complexe qui nécessite une planification méticuleuse et une exécution soignée pour réussir. Alors que les organisations se lancent dans la transformation du cloud, elles se concentrent souvent sur la migration des applications et des données vers le cloud, négligeant un aspect critique : l’intégration. L’un des défis majeurs que […]

Continue reading

12 juin 2024

Comment bien préparer la migration d’un parc applicatif dans le cloud avec IBM Consulting (2/2) ?

Dans notre article « Comment bien préparer la migration d’un parc applicatif dans le cloud avec IBM Consulting (1/2) ? », nous avons présenté les différentes étapes du pré-assessment technique qui consiste à analyser l’ensemble des applications du patrimoine applicatif. Dans cette seconde partie, nous allons détailler l’assessment technique à réaliser pour chacune des applications.   Phase […]

Continue reading

12 juin 2024

Comment bien préparer la migration d’un parc applicatif dans le cloud avec IBM Consulting (1/2) ?

Contrairement aux applications conçues et développées spécifiquement pour un environnement cloud, un parc applicatif « on premises » a généralement été bâti au fil du temps, avec des technologies datant d’époques différentes. Il est par nature plus ou moins hétérogène. Pour différentes raisons (par exemple la scalabilité horizontale et verticale de manière automatique en fonction du besoin, […]

Continue reading