Intelligence Artificielle

« On ne se forme plus, on se transforme par l’expérience »

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L’évolution des compétences et les nouveaux métiers en devenir constituent un véritable challenge pour le monde académique comme pour les entreprises. Au-delà de nouvelles méthodes de formation plus expérientielles et basées sur des cas réels, des ponts se développent entre ces deux univers. Explications avec Silvano Sansoni, Directeur Général des Ventes d’IBM France.

Quelles nouvelles compétences attend-on des managers et collaborateurs dans un monde en mutation ?

 

Silvano Sansoni – Avec l’émergence de nouveaux modèles, les cabinets conseils estiment que 50 % des métiers de demain sont encore inconnus et que 30 % des personnes changeront de travail dans les dix ans. Les besoins en compétences vont augmenter. Cette accélération se retrouvera à la fois dans les métiers manuels et conceptuels, dans les usines avec les cols bleus et chez les cadres avec les cols blancs. Parallèlement à cela, beaucoup de domaines pourront être automatisés. Pour 20 à 30 % d’emplois, l’intelligence humaine sera complétée par la machine grâce à l’intelligence artificielle, on parle d’intelligence augmentée pour l’association des deux. Un client pourra être orienté par un chatbot avant d’être mis en contact avec un conseiller qui sera assisté par une machine, qui ira chercher toutes les informations pertinentes sur le client. On ne recrutera donc plus des gens qui auront un savoir-faire mais un savoir-être. Parmi les nouveaux métiers qui vont arriver – et que l’on voit déjà poindre aux États-Unis ou en Europe du Nord –, il y a les « new collars », un intermédiaire entre les cols bleus et les cols blancs. Ils travaillent notamment autour du cloud, de la data science et de l’expérience digitale du client.

 

Comment relever ce défi de formation ?

 

S.S. – Il est intéressant de recourir à l’experiential learning, qui permet de se former en se confrontant à une expérience concrète, en immersion. On parle beaucoup de ce concept, mais on le met encore peu en œuvre. On peut par exemple avoir recours à un bref module thématique de formation des managers au design thinking, puis leur demander d’animer eux-mêmes des ateliers dans des domaines qui les sortent de leur zone de confort. Chez IBM, nous le faisons régulièrement pour les cadres et les non-cadres. Le secteur technologique et numérique est sans doute assez en avance dans ce domaine, mais l’experiential learning se pratique aussi dans le retail chez les franchisés. Avec l’intelligence artificielle, il est également important d’avoir des experts métiers, des spécialistes de la pharmacie, de l’industrie, de la banque… pour accompagner et corriger la machine. Dans ce contexte, les ressources humaines ne sont plus en train de se former mais elles se transforment au fil de l’eau pour acquérir au fur et à mesure les compétences dont elles ont besoin.

 

Comment l’enseignement supérieur et les entreprises peuvent-ils prendre en compte ces enjeux d’écosystème dans leur stratégie et dans leur politique de formation ?

 

S.S. – C’est un vrai sujet. Il y a aujourd’hui des collaborations entre le monde académique et l’entreprise mais ces deux mondes restent encore juxtaposés, sans grandes interactions. Comme cela a été le cas dans la banque ou le retail, le monde de l’éducation est pourtant disrupté par des plateformes collaboratives. On le voit par exemple avec OpenClassrooms ou Wikipédia, qui se sont lancés dans ce domaine. IBM a développé pour ses propres collaborateurs des plateformes avec un grand nombre de formations sur des sujets techniques ou d’inclusion. Ces bibliothèques ne suffisent pourtant pas à garantir une formation continue. Nous nous sommes donc attachés à construire d’autres projets. L’IBM France Academy, développée avec EMLyon pour principal partenaire, vise à construire une trajectoire de formation personnalisée. Le programme a été développé pour faire de la reconversion professionnelle de personnes qui travaillaient sur des technologies plus utilisées et qu’il fallait amener vers de nouvelles technologies comme l’IA, le cloud ou la blockchain. Quelqu’un qui sort d’une école d’ingénieur ou d’une école de commerce peut aussi suivre un parcours individualisé sur plusieurs mois, par exemple pour acquérir une formation thématique complémentaire de sa formation initiale, mener des stages sur un projet, se confronter à des expériences atypiques… C’est une formation qui donne lieu à une certification. Les candidats peuvent ainsi acquérir les doubles formations techniques et métier qui sont très recherchées sur le marché mais qui n’existent pas dans le monde académique.

 

Cette implication ne concerne-t-elle que des niveaux élevés de formation ?

 

S.S. – IBM est aussi partenaire, avec d’autres entreprises, d’un projet P-Tech français, à l’image de ce qui avait été proposé par le groupe à l’administration Obama il y a quatre ans. Il s’agit de permettre à des candidats issus de territoires défavorisés de rentrer par la grande porte dans l’informatique, dès le lycée, et de les mener jusqu’à un niveau bac+2. Ces jeunes seront suivis par des coaches pendant plusieurs années, avec la possibilité d’avoir un emploi à la clé. La demande de talents est tellement importante qu’il faut aller les chercher dans les nouvelles générations qui sont en situation d’exclusion et leur proposer des méthodes qui sont également proches de l’experiential learning. Nous espérons une validation par l’éducation nationale d’ici à la fin de l’année pour un début des formations à la rentrée 2019.

 

Quel bilan faire de l’accord conclu en 2015 avec EMLyon, et élargi fin 2017 ?

 

S.S. – Les premières années de la collaboration entre IBM et EMLyon ont permis de créer une relation digitale entre les étudiants et les professeurs pour construire une école de commerce 2.0. Le partenariat a été progressivement élargi à d’autres partenaires régionaux et à des startups pour rendre opérationnelle l’IA dans le domaine de l’éducation. Un premier laboratoire permet aujourd’hui de créer des parcours personnalisés pour acquérir la meilleure compétence au sein des différentes propositions. Un pas important a été franchi depuis le début de l’année avec un nouveau plan sur cinq ans. EMLyon sera la première école de commerce à se constituer en société anonyme et à former les étudiants en utilisant de nouvelles méthodes incluant l’IA. 2022 sera aussi l’année de l’ouverture du nouveau campus, dont IBM sera partenaire avec d’autres entreprises.

Découvrez le témoignage de Bernard Belletante Directeur Général de EMLYON Business School lors de Think Paris 2018

General Manager, Global Enterprise, IBM Global Markets

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